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 Fiche technique N°189 - Septembre 2024
L’IFV, vos références techniques
 Les goûts de souris dans les vins
 Depuis une dizaine d’années, on observe une recrudescence d’une altération organoleptique des vins, documentée depuis les années 70 : les goûts de souris. La fréquence d’apparition de ce défaut en France et dans le monde peut s’expliquer par la combinaison de différents changements : l’évolution des matrices liée au changement climatique et notamment une augmentation des pH conjointe à l’évolution des pratiques avec la limitation des teneurs en SO2 et le développement du recours à l’utilisation des flores indigènes pour conduire les fermentations. Ces changements ont une influence sur les dynamiques de populations microbiennes
> Les goûts de souris ?
La première particularité des goûts de souris est la multitude de descripteurs pouvant être employés pour les définir. L’origine du défaut est l’odeur de la cage de rongeur mal entretenue d’où le nom « goûts de souris » mais aujourd’hui on peut aussi les définir par pop-corn, charcuterie, riz basmati...
Figure 1 : Descripteurs sensoriels associés aux « goûts de souris »
Au pH du vin, ces molécules ne sont pas volatiles et ne peuvent donc pas être détectées par la voie orthonasale (c’est-à-dire au « sniffing », avec le nez). C’est donc au contact de la salive que l'équilibre des différentes formes des molécules est décalé vers la forme déprotonée (pH haut) et alors les molécules deviennent volatiles et donc perceptibles en fin de bouche, par la voie rétronasale.
De par ces particularités, on observe de fortes variations de perception au niveau de la dégustation qui peuvent s’expliquer par :
• Des différences de proportions entre les trois molécules, bien qu’à ce jour aucun descripteur en particulier ne soit associé spécifiquement à une molécule.
•Des différences de capacité à percevoir le défaut entre dégustateurs : nous ne sommes pas tous égaux face à ce défaut en raison des variations interpersonnelles du pH buccal (et une partie de la population est même complètement anosmique, c’est-à-dire insensible).
> À ce jour, deux origines possibles
• Une origine principale microbiologique : la formation des trois molécules serait due à des micro-organismes présents dans le vin et plus particulièrement les bactéries lactiques (Oenococcus oeni) ainsi que les levures d’altération Brettanomyces.
entraînant une plus grande sensibilité des moûts et vins aux altérations, notamment le défaut goût de souris.
Face à la récurrence de cette altération, plusieurs projets de recherche ont été menés ces dernières années dans les différentes régions viticoles. Au niveau régional ces travaux ont été menés dans le cadre du projet « Vins Sans SO2 » 2021-2023 soutenu par le CIVB et la Région Nouvelle Aquitaine. Cette fiche permet de faire un bilan sur les connaissances acquises lors de ces travaux sur les goûts de souris.
Les molécules responsables, à ce jour, des goûts de souris sont au nombre de trois et font partie de la famille des N-hétérocycles :
- APY : 2-acétyl-1-pyrroline
- ATHP : 2-acétyltétrahydropyridine
- ETHP : 2-éthyltétrahydropyridine
Au niveau chimique, ces trois molécules existent sous deux formes dans le vin : volatile et non volatile.
Figure 2 : Les N-hétérocycles
Figure 3 : Voies ortho et rétronasale (source BIVB)
• Une origine chimique : très peu documentée aujourd’hui, une seconde origine possible est la voie chimique et plus précisément la voie de Maillard (réaction des protéines et des sucres, bien connue en agroalimentaire). Cependant la part des molécules formée par cette voie est encore inconnue et des travaux sont en cours (Interhône).
    Les différences de sensibilité inter-dégustateurs sont importantes rendant l’évaluation quantitative et qualitative difficile avec, en premier lieu, la perception de la présence du goût de souris ou non et dans un second temps, sa description.
  










































































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