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 Le vin, nouveau symbole d’égalité et de pouvoir des femmes
Quelles sont les attentes des femmes vis-à-vis du vin?
Les femmes qui boivent du vin, autrefois mal perçues par la société, s’affirment aujourd’hui comme libres et les égales des hommes. En symbolisant cette évolution, le vin se positionne comme un produit moderne.
Ces représentations sont importantes à connaître, car elles guident les comportements et les pratiques. Détails d’une enquête réalisée pour Vin & Société.
L’image du père servant son vin à la table de famille a vécu. À sa place, un groupe de copines sirotent un verre après
une journée de travail ou une femme pré- pare un apéritif dînatoire pour ses invités. « En une génération, les représentations sociales du vin semblent avoir muté vers un univers plus féminin », souligne Céline Toussaint, docteure en psychologie et co-auteure avec l’IFOP d’une étude sur le sujet, à la demande de Vin & Société.
L’association a souhaité explorer l’image du vin auprès des femmes aujourd’hui. Car sous l’influence des mouvements fé- ministes et des lois en faveur de l’égalité
femme-homme, la place des femmes a considérablement évolué depuis les an- nées 70. Il semblait pertinent de vérifier comment, fortes de cette nouvelle posi- tion, elles envisagent le vin de nos jours. D’autant que, selon une étude* réalisée en 2022 chez les 25-34 ans, deux consom- mateurs de vin sur trois sont des femmes.
Lors d’entretiens semi-dirigés, 24 femmes et 6 hommes âgés de 18 à 64 ans ont été interrogés par l’IFOP sur leurs re- présentations sociales du vin, c’est-à-dire, sur l’idée qu’ils se font du vin.
Un contexte social en pleine évolution
L’évolution du cadre législatif depuis 1945 et les mouvements aujourd’hui re- layés par les réseaux sociaux contribuent à développer l’égalité femme-homme.
En outre, la crise sanitaire a révélé et amplifié un rapport au travail et à la vie iné- dit, notamment chez la génération Z. Au- jourd’hui, le travail n’est plus une fin en soi mais plutôt un moyen au service d’un pro- jet de vie tourné vers l’accomplissement de soi. La place des loisirs et le temps pour soi deviennent primordiaux.
Le vin, vu comme un totem français
« En 2004, pour les jeunes, les représen- tations sociales du vin étaient largement valorisées, associées à la convivialité, la
gastronomie française, les repas de famille ainsi qu’à l’image du père », indique Céline Toussaint. Vingt ans après, les représen- tations du vin restent toujours largement positives pour les femmes interrogées : liées au plaisir, au repas, à la convivialité.
Le vin est aussi intimement associé à la France : « Le vin, c’est comme la tour Eiffel », résume une participante. À la question « Une France sans vin, qu’en pen- sez-vous ? », les réponses sont assez una- nimes : « La France perdrait une partie de son patrimoine si elle ne faisait plus de vin. Ce sont les racines ».
Ce statut « totémique » du vin est à la fois une force et une faiblesse. D’un côté, il témoigne d’un attachement à un pro- duit de qualité, dont on est fier. Il est un marqueur culturel et identitaire fort. Mais de l’autre côté, il entrave les nouvelles pratiques. Les consommateurs ne s’auto- risent pas une consommation totalement décomplexée.
Il règne une pression culturelle autour du vin sur ce qu’il convient ou non de faire : avec quel vin faut-il marier tel plat, par exemple. Celle-ci vient freiner les nou- velles formes de consommation (vin en canette, vin frais, accords mets et vin non traditionnels) car elles s’apparentent à la transgression d’un interdit. Pour gagner de nouveaux consommateurs, « mieux vaut ne pas faire des remarques si les jeunes veulent boire du vin avec la pizza », insiste Céline Toussaint.
CONNEXION - VINS DE BERGERAC ET DURAS - SEPTEMBRE-OCTOBRE 2024 16
Économie
 Crédit Photo : iStock
  













































































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