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les organes de la plante, les baies, les moûts ou les vins. Il reflète les régimes d’absorption d’eau et d’azote antérieurs à la date de mesure. Cette méthode n’est donc pas bien adaptée à la gestion quo- tidienne de l’irrigation ou des pratiques culturales mais elle peut être utilisée en fin de saison viticole pour des discus- sions a posteriori, typiquement pour des bilans de fin de saison. Elle permet par exemple d’apprécier l’effet des stratégies de conduite du vignoble de la saison pré- cédente sur l’assimilation du carbone au regard des déficits en azote et en eau. Les valeurs couramment observées de δ13C de la vigne et l’estimation empirique du statut hydrique associée sont résumées dans le Tableau 1.
Mesure du flux de sève
Le flux de sève correspond au mouve- ment de l’eau, principalement à travers les vaisseaux du xylème depuis les racines jusqu’aux feuilles, où elle est évacuée à travers les stomates. Il permet d’éva- luer l’utilisation de l’eau au niveau de la vigne entière. Deux méthodes de mesure existent.
La méthode utilisant des sondes de dissipation thermique
Cette méthode utilise des sondes insé- rées sous forme d’aiguilles dans la vigne. L’une des aiguilles est utilisée comme réfé- rence et l’autre fournit un chauffage conti- nu. La mesure est basée sur le principe que la différence de température entre l’aiguille chauffée et l’aiguille de référence diminue lorsque le débit de sève augmente. Il est nécessaire de placer les aiguilles avec minutie pour éviter tout contact avec des
Figure 1. Une installation (démontée pour plus de visibilité) de capteurs permettant la mesure du flux de sève avec la méthode du bilan thermique.
tissus non conducteurs. De plus, il a été démontré que la variation circonférentielle et radiale du flux de sève peut entraîner une sous-estimation ou une surestimation de ce dernier. Par conséquent, la méthode des sondes de dissipation thermique n’est pas utilisée pour un usage commercial.
La méthode par bilan thermique
Cette méthode est aussi basée sur la mesure d'une différence de température pour estimer le flux de sève mais utilise un manchon non-intrusif équipé d’une ré- sistance chauffante. Deux thermocouples sont placés de part et d’autre de la résis- tance. Le manchon est enroulé autour du bras de vigne ou de la baguette (tige). Il maintient un ajustement serré entre le bois et les thermocouples pendant les contractions diurnes de la tige (Figure 1). La chaleur est fournie de manière uni- forme et radiale sur toute la section de la tige mesurée afin d’éviter les perturba- tions dues au contact avec des tissus non conducteurs et d’intégrer toute variation circonférentielle et radiale du flux de sève.
Critères de sélection
des méthodes de mesure sur la plante en fonction de critères opérationnels pour l’aide à la décision d’irrigation sur le terrain
La programmation d’un tour d’eau doit être réactive, précise et réalisée avec anti- cipation pour optimiser la rotation et la du- rée de l’irrigation dans toutes les parcelles d’un grand vignoble. Pour ce faire, les me- sures sur lesquelles se base la décision d’irrigation doivent fournir des informa- tions en temps réel, presque continues (in- tervalles de moins d’un jour) et représenta- tives du statut hydrique de l’ensemble du vignoble (support spatial). Le Tableau 2 catégorise les méthodes présentées dans cet article en fonction de ces trois critères.
Les méthodes dont la fréquence des mesures est discontinue (Tableau 2) sont laborieuses et les mesures sont généra- lement réalisées à quelques dates seule- ment. À l’inverse, les méthodes dont la fré- quence des mesures est continue évitent de manquer des épisodes de stress et permettent de compenser les variations du flux de sève dues à des facteurs bio- logiques et/ou environnementaux par des mesures prises à d’autres moments. Cependant, elles nécessitent des installa- tions semi-permanentes ou permanentes.
Toutes les méthodes présentées dans cet article sont réalisées sur quelques plantes seulement (support spatial discret). Cela si- gnifie qu’elles sont sujettes à des problèmes d’échantillonnage spatial et peuvent se révé- ler faiblement représentatives de l’ensemble de la parcelle ou du vignoble. L’enjeu est
Technique
Tableau 1. Valeurs couramment observées pour les potentiels hydriques foliaires de base et à midi (ѰB et ѰM respectivement), des valeurs de potentiel hydrique de tige (Ѱtige) et de δ13C en fonction des niveaux empiriques de statut hydrique. Un déficit hy- drique correspond à une réduction de la consommation d’eau de la vigne due à une régulation hydrique qui n’est pas préjudiciable au rendement et à la qualité de la récolte. À l’inverse, un stress hydrique correspond à une réduction préjudiciable de la consom- mation en eau de la vigne. Adapté de Carbonneau (1998), Lovisolo et al. (2010, 2016) et van Leeuwen et al. (2009)7,8,9,10.
ѰB (MPa)
ѰM (MPa)
Ѱtige (MPa)
δ13C
Pas de déficit hydrique
Déficit hydrique léger
Déficit hydrique modéré
Stress hydrique sévère
> -0,2
-0,2 à -0,3
-0,3 à -0,5
< -0,8 à -0,9
> -0,9
-0,9 à -1,1
-1,1 à -1,3
< -1,4
> -0,6
> -0,6 à -0,9
-0,9 à -1,1
< -26
-24,5 à -26
-23 à -24,5
Déficit hydrique modéré à stress hydrique léger
-0,5 à -0,8
-1,3 à -1,4
-1,1 à -1,4
-21,5 à -23
CONNEXION - VINS DE BERGERAC ET DURAS - JUILLET-AOÛT 2023
26
< -1,4
-21,5