Page 27 - GESI n°96 // Mai 2022

...prenez à gauche et laissez-vous imprégner par l’ambiance des lieux et la vie des gens d’ici. Ensemble faisons un pas de côté, il n’y a rien de tel pour s’aérer les neurones après d’ intenses journées de travail. Découvrir la région, ouvrir les yeux sur des paysages inconnus, écouter les histoires qui se racontent dans les rues, l’invitation nous est adressée...
Laissons un moment Cherbourg à ses préoccupations industrieuses de ville moyenne, le nucléaire, la Marine Nationale, la mer et ses pêcheurs...
Un autre patrimoine lié à la ville et à son environnement, en effet, nous tient compagnie depuis longtemps. Comment venir à Cherbourg sans évoquer “Les parapluies de Cherbourg" ?
Tourné en 1963, ce film occupe une place à part dans l’histoire du cinéma français. Il relate les amours mouvementées de Geneviève (Catherine Deneuve, dans le premier grand rôle qui la rendra célèbre) et de Guy (Nino Castelnuovo), sur fond de guerre d’Algérie.
En plein milieu des 30 glorieuses, le 7ème Art est le spectacle par excellence, avec plus de 350 millions de spectateurs à la fin des années 50, chiffre qui va régulièrement décroitre avec l’arrivée de la télévision (213 millions en 2019, avant un repli majeur vers les écrans privés à travers l’offre en ligne, depuis la crise sanitaire). En 1964, lorsque le film sort, le box office culmine avec “Le gendarme à Saint Tropez” (près de 8 millions d'entrées) devant “Merlin l’enchanteur”, un dessin animé Disney et “Bons baisers de Russie”, second exemplaire de la saga James Bond.
“Les parapluies de Cherbourg” détonne dans le paysage, car c’est une comédie musicale, un genre qui attire peu en France, même si, 2 ans plus tôt “West Side Story” a cartonné avec près de 9 millions d'entrées. Il a fallu aux auteurs, Jacques Demy pour la réalisation et Michel Legrand à la musique, associés à la productrice Mag Bodard, beaucoup d’énergie pour faire aboutir leur projet dont la carrière commerciale fut plus qu’honorable avec 1, 27 million de spectateurs.
A contre-courant des goûts supposés du public, le duo Demy- Legrand réussit à imposer son film “en-chanté”. Jusque-là, on connaissait le genre musical, dans lequel une vedette reconnue fait son numéro en poussant la chansonnette de ci de là, à l’instar de “D’où viens-tu Johnny ?” qui cumule près de 3 millions d’entrées en 1963 en capitalisant sur l’émergence de Johnny Hallyday. En revanche, le pari d’une vraie comédie musicale, avec dialogues chantés, semble perdu d’avance. La suite donnera raison au talent de Demy qui adorait le célèbre “Chantons sous la pluie” de Stanley Donen, et à la verve musicale de Michel Legrand dont nous continuons à fredonner les refrains.
Le film sera distingué en 1963 par le prix Louis-Delluc (considéré comme le prix Goncourt du cinéma) et la Palme d’Or au Festival de Cannes 1964.
Dans son travail préparatoire, Jacques Demy n’avait pas d’idée précise quant à la localisation de l’action. Lors des repérages, il est déçu par Le Havre, un temps envisagé, puis séduit par la lumière de Cherbourg, où il trouve immédiatement la rue dans laquelle il situe le magasin de la mère de Geneviève. L’enseigne de ce dernier, “Les parapluies de Cherbourg”, donne son titre au film.
La collaboration Demy-Legrand se poursuivra 3 ans plus tard avec “Les demoiselles de Rochefort” qui troque les berges de la Manche pour celles de l’Atlantique, toujours en chansons. Puis “Peau d’âne” en 1970. Dans “Une chambre en ville” (1982), également musical, Demy travaille avec Michel Colombier car Michel Legrand ne croît pas que le film, dont la teneur sociale et sombre tranche violemment avec la gaieté légère des “Parapluies”.
Jacques Demy est décédé en 1990 ; sa mémoire a été vigoureusement perpétuée par sa compagne Agnès Varda (1928 – 2019). Le film « Les parapluies de Cherbourg » est disponible en DVD ou en VOD (La Cinetek, dans la série des grands classiques du 20ème siècle).
© Image Jean RABIER
N°96 // MAI 2022 // QUELQUES NOUVELLES DES DÉPARTEMENTS GEII / 27
En sortant de l’IUT...
REVUE DES DÉPARTEMENTS DE GÉNIE ÉLECTRIQUE & INFORMATIQUE INDUSTRIELLE