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Se préparer face
au gel de printemps
Avec le réchauffement climatique, les vignes ont déjà débourré lorsque
le gel frappe au printemps, provoquant des dégâts et pertes de récolte. Au-delà de la nécessaire adaptation de ses pratiques, de nombreux moyens de lutte active existent sur le marché, dont voici quelques exemples.
Viticulture et climat : l’avis d’un expert
Jean-François Berthoumieu, physi- cien (spécialiste en mécanique des fluides), climatologue, et directeur de
l’Association climatologique de Moyenne- Garonne (ACMG), apporte son regard sur la façon d’aborder les aléas climatiques. Il collabore depuis quelques années au sein du groupe de travail mis en place par le syndicat viticole de Saint-Émilion.
Pensez-vous que l’agriculture en gé- néral, et en particulier la viticulture dans notre département, a un rôle à jouer dans notre adaptation au changement clima- tique ?
Effectivement, ils sont pour moi les élé- ments clefs de la gestion de l’eau dans les années à venir. Il faut un changement de comportement assez radical dans celle-ci, que ce soit au niveau des sols, des lacs, des zones humides, des retenues colli- naires... Il est nécessaire de revoir la direc- tive « cadre » de l’eau conçue bien avant que nous ne prenions en compte l’am- pleur du changement climatique en cours. Tout au long des bassins versants, il faut stopper les eaux de ruissellement, ralentir l’écoulement des cours d’eau, créer des lacs comme le font les castors... L’agri- culture, la viticulture, la sylviculture, par la gestion de parcelles de taille raisonnable (3 ha) sont des acteurs majeurs dans ce changement de paradigme. Leurs actions et leurs modes d’exploitation, pourvu qu’ils
Jean-François Berthoumieu est directeur de l’Association climatologique de Moyenne- Garonne.
soient adaptés, constitueront autant de facteurs positifs d’adaptation au chan- gement climatique. Cet ensemble aura même des répercussions pour les zones urbaines, permettant de limiter les îlots de chaleur au cœur des villes et dans un environnement favorable de diminuer les températures extrêmes de quelques de- grés par l’évapotranspiration des végétaux aux périodes caniculaires
Le gel de printemps, redouté par les viticulteurs et arboriculteurs, devien- dra-t-il une question récurrente dans les années à venir ?
2022 pourrait être une année moyenne dans un futur proche, 2021 étant à consi- dérer comme une année plutôt pluvieuse. La question de l’irrigation pourrait se poser dans des zones ou l’eau est disponible. Il s’agit sans doute moins d’une question de l’existence des gels de printemps que d’une variation temporelle du démarrage de la végétation. Le changement clima- tique a incontestablement une incidence sur cette dernière. La variation positive d’un degré des températures minimales durant la période hivernale, induit 15 jours à trois semaines d’avance sur les dates de débourrement des végétaux. Les gels de printemps ne sont pas plus fréquents, mais interviennent maintenant à un mo- ment où la vigne et les arbres fruitiers ne peuvent les supporter.
Le suivi effectué en ULM ou en avion à 3 000 mètres d’altitude pour obtenir une cartographie des vignobles durant les épi- sodes de gel doit permettre de mettre en œuvre des moyens collectifs pour réduire les risques. Nous avons clairement identi- fié que les parcelles les plus gélives sont sur des sols enherbés et asséchés. L’air contenu dans le sol empêche sa chaleur de remonter pour compenser une partie de celle qui part par rayonnement. Alors qu’un sol saturé d’eau restitue 80 watts au mètre carré, un sol asséché ne restitue que 15 watts. Il y a donc une réflexion à
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